CHAPITRE XIII

Corran se redressa, époussetant sa tunique verte.

– Je suis Corran Horn. Mon second est Ganner Rhysode. Nous sommes venus pour…

La femme l’interrompit. Les deux hommes levèrent leurs carabines-blaster.

– Je sais pourquoi vous êtes ici, et je ne vous laisserai pas le faire !

Ganner éclata de rire.

– Tu crois qu’ils pourraient nous arrêter ?

Il leva un doigt ; les fusils des deux jeunes gens se pointèrent vers le ciel. Puis il souleva les hommes du sol et les maintint ainsi, suspendus en l’air.

Corran se tourna vers lui.

– Pose-les tout de suite ! Doucement ! (Il se tourna vers la femme.) Veuillez excuser son enthousiasme. Je dois avouer que j’ignore pourquoi vous pensez que nous sommes là.

– Je suis là depuis trois mois, mais j’ai continué à me tenir informée ! Vous avez dit que votre nom était Horn, n’est-ce pas ? De l’Escadron Rogue ?

– Oui. Je suis devenu Chevalier Jedi après la fin de la guerre.

– Vous n’étiez pas à Mrlsst ?

– C’était avant mon époque. Mais j’ai servi avec beaucoup de gens qui y étaient : Wedge Antilles, Hobbie Klivian, Wes Janson, Tycho Celchu… Ils ont pris leur retraite depuis. Vous étiez à l’université ?

– Oui. Je travaillais à mon doctorat. Je ne connaissais pas les Rogues, mais des amis à moi les avaient rencontrés. L’une d’elle est partie travailler avec eux.

– Koyi Komad ? Elle s’est mariée, il y a quatorze ou quinze ans. Elle a épousé un Quarren de l’escadron.

– Je sais. J’étais à son mariage.

Corran sourit.

– Vraiment ? Je faisais partie du service d’ordre. A l’époque, je n’avais pas de barbe.

– Je me souviens qu’il y avait un tas d’hommes en uniforme. (Elle lui tendit la main.) Je suis Anki Pace. Je dirige la mission archéologique de l’université d’Agamar.

Corran remarqua une certaine tension dans leur poignée de main.

– Pourquoi pensez-vous que nous sommes là, docteur Pace ?

– Différents sites archéologiques ont été dévalisés. Les artefacts volés étaient probablement liés aux Chevaliers Jedi, bien avant la purification. Ils sont de grande valeur, puisque l’Empire a essayé de détruire tout ce qui appartenait à l’Ordre. Et ils pourraient nous apprendre comment étaient les Jedi à l’époque.

– Vous croyez que des Chevaliers Jedi sont venus reprendre ces objets ?

Un des jeunes hommes grogna.

– Une amie était sur place. On l’a laissée pour surveiller le site la nuit. Quand les autres sont revenus, les objets avaient disparu et elle ne se souvenait de rien.

– Le voleur avait induit une amnésie pour qu’elle ne se sache pas qui avait commis le vol ?

– Non ! cracha l’homme. Elle avait oublié les deux dernières années de sa vie ! Tout ce qu’elle avait appris s’était envolé. Les Jedi en sont capables, je le sais. Ils peuvent aussi vous faire voir des choses qui ne sont pas vraies.

Et je sais que Kyp a utilisé la capacité d’oblitérer la mémoire de quelqu’un sur l’architecte de l’Etoile Noire. Il a brisé cette femme à qui il a fallu des années pour reprendre une vie normale.

Il regarda son compagnon.

– Que sais-tu à ce sujet ?

Ganner réagit comme si Corran lui avait craché au visage.

– Rien ! Je ne suis pas un voleur, et je n’ai aucune information sur cette histoire.

– Pourtant, tu sais que des objets sont arrivés sur Yavin 4… Certains de ces artefacts proviennent de collectionneurs. Mon épouse a négocié pour en obtenir plusieurs, et si leur origine était douteuse, je l’aurais su.

Pace ricana.

– Facile à dire ! Le genre de choses qu’un Jedi aimerait me fourrer dans la tête pour que je ne le soupçonne pas d’avoir volé nos trouvailles.

– C’est ridicule, dit Ganner. Comment osez-vous nous accuser ainsi ?

L’autre jeune homme eut un rire sans joie.

– Mes parents viennent de Carida. Je pourrais en dire long sur les Chevaliers Jedi…

Corran leva une main.

– Arrêtez ! Ça ne nous mènera à rien. Je commence à avoir froid, et j’aimerais entrer dans votre caverne, mais vous ne nous y autoriserez pas tant que je ne vous aurai pas convaincue de nos bonnes intentions. Alors, répondez à une question.

– Laquelle ?

– Avez-vous envoyé des messages sur ce que vous avez découvert ici ?

Le premier jeune homme secoua la tête.

– Les Jedi ont des visions. Ils sont capables de voir l’avenir. C’est comme ça qu’ils ont su ce que nous avions trouvé.

– A toi de répondre, Ganner, dit Corran.

– Comme tu veux. Cette capacité est rare, et nous ne la contrôlons pas vraiment. Mais si nous avions vraiment connu l’avenir, ne pensez-vous pas que nous serions venus prendre les objets avant que vous les découvriez ?

– Je ne sais pas…, dit le jeune homme.

Le docteur Pace tapota l’épaule du jeune homme.

– Denna et toi, Vil, retournez à votre poste. Je crois que les rats des sables sont occupés à s’entre-tuer, mais je préfère qu’on les surveille, au cas où ils décideraient de nous attaquer.

– Oui, docteur.

La femme regarda Corran.

– Pourquoi êtes-vous ici, alors ?

– Nous avons eu des rapports sur des raids visant la Bordure. L’université n’a pas pu vous contacter. On craignait que vous ayez été victimes d’une attaque. Nous avons été envoyés pour vérifier.

– Quelle sorte de raid ?

– Nous pensons qu’ils sont menés par des non-humains.

– Intéressant… (Elle se tourna vers la caverne et fit signe à Corran et à Ganner de la suivre.) Venez avec moi.

Ils passèrent entre les toiles tendues pour fermer l’entrée de la cave. Il y en avait un autre jeu à cinq mètres de profondeur. La zone située entre les deux fermetures était couverte de seaux emplis d’un liquide noir ressemblant à du réfrigérant pour moteur. L’odeur était épouvantable, même à travers les respirateurs.

Pace ouvrit la seconde barrière de toile, puis la referma et enleva son respirateur. Corran l’imita. L’air avait toujours un relent désagréable, mais il était plus frais.

– Trista, appela Pace, viens ici !

Une jeune femme mince aux cheveux noirs avança.

– Oui, docteur Pace ?

– Ces… Jedi… s’intéressent à tes théories sur l’écologie de Bimmiel. Voici Trista Orlanis, une de mes étudiantes.

– Ravie de vous rencontrer, dit la jeune femme.

Son regard s’attarda davantage sur Ganner que sur Corran. Un phénomène que celui-ci trouva un peu exaspérant.

– Savez-vous ce que disait la mission de reconnaissance impériale ?

– Oui, répondit Ganner. J’ai lu le rapport, et je l’ai résumé à Corran.

– Bien. Dans ce cas, vous savez que les Impériaux sont arrivés ici au moment où Bimmiel se rapprochait du soleil sur son orbite elliptique. Plus elle approche, plus elle se réchauffe, et les calottes polaires fondent. L’humidité provoque une abondante croissance de la végétation. La chaleur fait aussi sortir les shwpis de leur hibernation. Ce sont des herbivores, donc ils mangent, se multiplient et mangent de plus en plus. Comme ils ne digèrent pas la plupart des graines, ils les excrètent, couvertes d’un fertilisant organique.

« D’autres animaux ne supportent pas la chaleur, donc ils émigrent vers les régions polaires pendant que la population de shwpis explose. Puis, quand la planète s’éloigne du soleil, elle se rafraîchit, et les créatures qui étaient parties reviennent dans les régions équatoriales. Les shwpis ont dévasté la végétation, permettant aux orages et aux vents de redistribuer une grande quantité de terre. L’humidité se concentre de nouveau dans les calottes glaciaires, ce qui explique que cette région soit actuellement si sèche. Les prédateurs, surtout les rats des sables, savent se déplacer à travers les dunes. Ils chassent les shwpis qui n’ont pas trouvé d’abri souterrain où hiberner.

– Les Impériaux n’ont pas vu les rats des sables parce qu’ils n’étaient pas dans la zone qu’ils ont examinée.

– Exact. Ils avaient postulé l’existence de créatures de ce type, mais ils n’ont pas eu le temps de la confirmer. (Trista désigna la fermeture de toile.) Les seaux contiennent un « concentré » de rats des sables morts. Ils ont cette odeur après quelques jours… Elle les tient à l’écart, la plupart des créatures considérant que l’odeur de décomposition de membres de leur espèce est un signe de danger. Nous sommes donc relativement en sécurité ici.

Corran enleva ses lunettes.

– Vous m’en voyez ravi. Mais vous ne nous avez pas fait entrer pour nous donner un cours sur l’écologie de Bimmiel, docteur Pace. Vous avez réagi quand j’ai dit que les raids étaient conduits par des non-humains.

– Vous n’êtes peut-être pas totalement idiot, Jedi, dit la femme. (Elle fit signe à Corran de la suivre. Ganner leur emboîta le pas, mais elle l’arrêta.) Attendez ici. J’ai confiance en lui. Vous, je ne suis pas sûre.

Ganner ricana mais ne fit pas de commentaire.

Corran lui adressa un clin d’œil puis partit. Le passage devenant plus étroit et plus bas, il fut obligé de se plier en deux.

Le couloir débouchait sur une grande salle ronde bien éclairée. Une demi-douzaine d’étudiants y travaillaient. Utilisant des brosses et des petites truelles, ils déplaçaient le sable avec précaution. Deux autres étudiants passaient des artefacts au numériseur et examinaient les données de leurs datablocs.

Elle le conduisit devant une console d’ordinateur.

– Jens, affiche le scan AR-312. (Pendant que la jeune femme obéissait, Pace se tourna vers Corran.) Nous avons récupéré un cadavre, les restes momifiés d’une créature. Il semblerait qu’elle se soit réfugiée ici après avoir été attaquée par des rats des sables. Les marques de dents sur les os correspondent à…

Corran cessa d’écouter quand l’image holographique d’un crâne apparut au-dessus de la plaque d’holoprojection. Le crâne plus allongé qu’un crâne humain avait une crête. L’ordinateur souligna les traces de fracture et les déformations de la face. Les pommettes avaient été brisées et mal ressoudées, donnant au visage un aspect irrégulier, et l’os du nez semblait avoir éclaté.

– Par les os noirs de l’Empereur !

– Il n’est pas très joli. Et il a des griffes sur les mains, les épaules, les doigts de pied, les talons et les genoux. Notez qu’il a tué au moins deux rats des sables. Nous avons aussi récupéré les objets qu’il avait avec lui : son armure, des armes… C’est une trouvaille majeure. Je n’ai jamais rien vu de semblable !

– Le problème, docteur, c’est que moi, oui !

Corran frissonna, se souvenant des images de cadavres de Yuuzhan Vong vues dans le rapport de Luke.